La doctrine des « Anciens », l’Hinayana, porteur du message originel du Bouddha, a survécu sous
la forme du Theravada.
L’ortodoxie comme seule règle
Le Theravada est la seule lignée du Sud à s’être maintenue
jusqu’à nos jours. Ses bases furent fixées lors du synode de
Pataliputra en 244 av. notre ère par un moine cinghalais :
Moggaliputta Tissa.
L’Hinayana se veut une école de stricte observance de la Loi
telle qu’elle a été définie par le Bouddha historique.
L’essentiel des règles est contenu dans le « Trois Joyaux », les
trois corbeilles, telles que définies lors du premier concile.
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Abhidharma Pitaka : La Doctrine
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Sutta Pitaka : Les sermons de Bouddha
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Vinaya Pitaka : les règles du sangha
La doctrine peut se résumer en cinq points essentiels :
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Le monde est affecté par les trois défauts majeurs : la souffrance, l’impermanence, l’impersonnalité ou non soi.
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Il n’existe pas de divinité suprême, ni dans le passé ni dans le futur.
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Le Bouddha n’est qu’un maître parmi d’autres qui a ouvert le chemin de l’illumination après l’avoir connue lui
même.
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Bouddha a eu six prédécesseurs. Un huitième Bouddha, ou Bouddha du futur, Maitreya, est attendu dans trente
mille ans.
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La souffrance ne peut être détruite que par la disparition du désir. La voie est la voie médiane définie par le
Bouddha.
Chacun est responsable de son salut au cours des vies successives. La notion d’âme, telle que la voient les chrétiens ou
celle d’âme universelle ou individuelle du védisme, est totalement absente du bouddhisme Theravada.
Une osmose entre clergé et population
Le salut promis par le Theravada est réservé à la communauté religieuse. Malgré cela, l’osmose morale et culturelle entre
moines et laïcs est évidente. Le sangha comprend quatre assemblées : les moines, les nonnes, les laïcs hommes et
femmes.
Les hiérarchies religieuses se sont toujours investies dans les affaires de leur pays
avec une influence certaine.
Jusqu’au début du XXème siècle, ce sont les bonzes (moines Hinayana) qui
enseignaient la Loi bouddhique mais aussi la langue, les sciences, la philosophie,
l’histoire. Les Rois leurs confiaient souvent des postes de hauts fonctionnaires en
raison de leur « sagesse ».
Les moines étaient consultés pour toute décision personnelle ou familiale
importante.
Aujourd’hui, ils sont encore considérés par le peuple comme les meilleurs
intermédiaires entre le monde d’ici-bas et d’en haut ».
Les bonzes ne peuvent assurer leur subsistance sans la générosité des laïcs.
Nombre d'entre eux restent en contact avec la population. Chaque jour, au petit
matin, ils vont mendier leur nourriture avec leur bol, en de longues processions.
Les habitants les attendent pour leur donner le riz, ce qui leur apportera les
mérites afférents à l’aumône.
Environ 50 à 60% des garçons effectuent
traditionnellement un « passage » de trois mois dans un
monastère. Lorsque les enfants rentrent dans leur famille,
ils ont noué avec le bouddhisme des liens indéfectibles. Les adultes retournent faire des retraites,
à un moment important de leur vie : ils redeviennent pendant un temps des moines bouddhistes.
La vie monastique est gouvernée par les règles définies dans l’une des trois « corbeilles » du
Canon Pali: la Vinaya. L’ordination a lieu en deux étapes. A l’âge de huit ans (âge limite), le futur
moine quitte la vie laïque pour le « noviciat ». Les novices suivent les « dix préceptes » :
s’abstenir de détruire les êtres vivants, de prendre ce qui n’est pas donné, de mauvaises
conduites sexuelles, de toute parole incorrecte, de breuvages ou de drogues menant à
l’inattention, de manger à une heure inappropriée, de danser, de chanter, de jouer de la musique,
d’aller au spectacle, de porter des parures, de s’embellir avec des cosmétiques ou de se
parfumer, de dormir dans un lit haut et luxueux, d’accepter de l’argent.
Lorsque le novice est prêt, vers vingt ans, l’ordination complète est prononcée. Le nouveau
« bhikkhu » obéit alors aux 227 règles de la Vinaya.
Il faut noter que revenir à la vie civile n’est pas un déshonneur : les hommes deviennent souvent
moines pour des périodes limitées. En Thaïlande, la plupart des garçons ont, au moins une fois
dans leur vie, la tête rasée et sont ordonnés pour quelques semaines.
La plupart des moines sortent du monastère au lever du jour pour l’aumône matinale et rentrent pour manger avant midi
comme prescrit par la Vinaya. Certains voyagent entre les monastères, d’autres consacrent leur temps aux laïcs.
Un moine a le droit de posséder seulement les « huit nécessités » : Le bol à aumônes, le rasoir, l'éventail, l'ombrelle,
l'aiguille à coudre et les trois pièces de la robe.
Sri Lanka : le berceau du Theravada
L’histoire du Sri Lanka commence véritablement en 242 avant notre ère, avec l’arrivée dans l’ile de deux des enfants
d’Ashoka, Mahinda son fils et Sanghamitta sa fille, qui convertissent au bouddhisme le roi cinghalais Devanampiya Tissa.
Celui-ci fait construire le monastère de Maha Vihara, pour abriter les objets sacrés apportés par les fils d’Ashoka.
Un siècle plus tard, le roi Dutthagamani installe
sa capitale à Anuradhapura et fait du
bouddhisme la religion d’état. En 88 avant
notre ère, le canon pali est rédigé par une
assemblée de moines. Le Sri Lanka devient le
centre spirituel du Theravada.
Au Vème siècle, Buddhagosha, un brahmane
indien converti au bouddhisme, arrive au Mahâ
Vîhara. Son autorité en matière de bouddhisme
lui permet de rassembler les différentes écoles
qui s’étaient formées. Il convainc le Roi et les
nobles de lancer une conversion générale du
peuple.
Les invasions tamouls (Inde du sud), les
changements politiques, l’arrivée des portugais, puis des hollandais et enfin des
britanniques ne purent réduire le bouddhisme au Sri Lanka. En 1975, les tamouls
hindouistes du nord de l’ile, accusés de vouloir détruire la religion nationale entamèrent une
guerre d’indépendance qui a fait de milliers de morts.
Un bouddhisme serein mais engagé
Chaque fois que le sangha a été menacé lors des invasions, il s’est toujours redressé, parfois en faisant appel aux «
frères étrangers », moines birmans au Xème siècle ou bonzes thaïs à la fin du XVIIIème siècle.
La caractéristique du bouddhisme cinghalais est "la sérénité de celui qui ne doute pas".
Elle trouve son origine dans la simplicité des textes rédigés par Buddhagosha (Visuddhi
Magga). L’accent est mis sur la méditation, seule voie vers la délivrance, avec une
progression en trois étapes : la moralité, la concentration et la sagesse.
Pour avoir une attitude éthique (moralité), il faut d’abord se connaître soi même. Pour
atteindre la concentration maximale, le méditant travaille sa respiration et les « alarmes
de son corps » : il pratique la méditation Vipassana qui le conduit à se fondre avec l’objet
de sa méditation. L’entrainement à la sagesse lui permet de comprendre l’impermanence,
la vacuité, l’impersonnalité et la douleur universelle.
Le sangha cinghalais a toujours eu une influence
politique forte. Que ce soit par le cautionnement
des lignées de rois ou plus récemment, au XIXème
siècle, lorsque les britanniques décidèrent de
confisquer la relique la plus sacrée du Sri Lanka, la
« Dent de Kandy » (une dent du Bouddha), en
fanatisant la foule pour contraindre les colonisateurs
à rendre la précieuse relique.
Le bouddhisme au Sri Lanka a généré de multiples créations de monuments, de sculptures ou de fresques dont on
trouvera l'illustration en page "Sri Lanka" dans le site "Voyages en Terres Bouddhistes".
Birmanie : La citadelle du bouddhisme
Une longue histoire politique marquée par le Theravada
Les Pyus, peuple tibéto-birman fondateur du royaume de Pegu, avait adopté un syncrétisme entre bouddhisme et
hindouisme dès le Ier siècle.
Parallèlement, les royaumes arakanais se développèrent, le long du golfe du Bengale,
dans la foi bouddhiste jusqu'à l'arrivée des Mongols en 957.
Les Mons installèrent dans le delta fertile de l'Irrawaddy un état centralisé qui s'étendait
jusqu'au golfe de Thaïlande. A la fin du VIIIème siècle, le bouddhisme Theravada était
très implanté, faisant même reculer l'hindouisme et le Mahayana dans le nord du pays.
Au milieu du IXème siècle apparaissent les Birmans qui installèrent leur capitale à Pagan
avant de conquérir tout le pays.
Ils se convertirent au bouddhisme mais, animistes, ils lui associèrent le culte des " Nats ",
esprits invoqués pour résoudre les problèmes du moment.
Au XIème siècle, le roi Anawratha, converti au Theravada par le moine Shin Arakan,
conquiert le pays Mon et ramène l'ensemble de la famille royale ainsi qu'un grand nombre
de moines et de lettrés.
Le pays unifié devient une terre de bouddhisme. La plaine de Pagan se couvre de temples
au fil des années.
En 1287, les Mongols de Kubilaï Khan s'emparent de Pagan. Les Mons comme les Shans ou les Thaïs occupent certaines
parties du pays. Le sangha birman entre dans une période difficile qui va durer jusqu'en 1472, date de l'arrivée du roi
Dhammazedi sur le trône de Pegu. Ancien moine, il imposa le Theravada comme religion officielle.
Au cours des siècles qui suivirent, le pays connut un certain nombre de soubresauts politiques mais la foi theravadin
prévalut sans cesse.
La Birmanie devenue colonie britannique, retrouva son indépendance en 1948. Ce fut le début d'une période de violences
qui aboutit à la prise de pouvoir par le général Ne Win en 1958. Depuis, le sangha comme le peuple subissent la violence
de la gestion politique des militaires.
Les récentes évolutions politiques ne changent pas grand chose à la situation. Ce n’est qu’un habillege du régime pour
paraitre plus “démocratique” au niveau international.
Malgré cela, la Birmanie compte plus de 40 000 000 de bouddhistes fervents, soit plus de 85% de sa population, qui, au
travers du Theravada, aspirent à un meilleur avenir.
Thaïlande, Laos, Cambodge, les trois visages d’une même foi
L'introduction du Theravada en Thaïlande et au Laos
Vers 255, l'armée chinoise envahit le royaume d'Aïlao, dans le Yunnan. Ses habitants, bouddhistes, se réfugient dans la
plaine centrale du Siam déjà habitée par les Mons qui avaient en grande partie adopté le bouddhisme. Il en fut de même
au Laos où les populations étaient passées sous le contrôle des Etats Mons. Cette civilisation, le Royaume de Dvaravati,
se développe jusqu'au IXème siècle avant de succomber devant la puissance des Khmers. Le Theravada résista pendant
trois siècles aux influences du Mahayana et de l'hindouisme. En 1238, commence une longue période de rebellions contre
le pouvoir d'Angkor.
Un premier Royaume indépendant vit le jour à Sukhotaï, dans le Nord Ouest de la
Thaïlande. Le Roi Rama Khameng (1275-1317) fit du Theravada la seule religion
officielle du pays. Ses successeurs, surnomés les " Rois pieux " s'abstinrent de
toute conquête militaire pour mieux se consacrer à leur foi. Ils firent venir à la cour
des moines cinghalais pour propager la doctrine des Anciens dans le sud. Ils
fondèrent plusieurs monastères et formèrent des lignées de professeurs.
En 1438, le Royaume d'Ayutthaya, fondé en 1350 par Rama Dhipati, annexe
Sukhotaï avant de soumettre l'autre Royaume du Nord, Chiang Maî (Lana) et la
plus grande partie du Cambodge, permettant au Theravada de s'installer
définitivement en Thaïlande.
Les puissants rois Pra Naraï (1657-1688) et Boromokot (1733-1758) développèrent les échanges avec la Chine, l'occident
et le Sri Lanka. C'est le Siam qui envoya des moines au Sri Lanka pour y aider le bouddhisme en difficulté.
En 1767, le royaume d'Ayutthaya succombe sous les coups des
Birmans. Le général Taksin réussit à s'enfuir. Il se proclame roi et
crée une nouvelle capitale à Bangkok, " nomme " le roi du
Cambodge et annexe le Laos. Sous son autorité, la communauté
religieuse mit en place les derniers éléments de l'observance
stricte de l'enseignement du bouddha.
L'un de ses généraux le fait mettre à mort en 1782 et fonde la
dynastie Chakri en devenant Rama Ier. Son troisième successeur,
Mongkut (Rama IV) devint roi après avoir passé vingt-sept ans
dans un monastère. Il réforma profondément le pays en
s'appuyant sur le clergé bouddhique. Ce pacte tacite dure encore
puisque 94% de la population thaïlandaise est bouddhiste et d'une
fidélité inconditionnelle à son roi.
Au Laos, la situation évolua de manière plus confuse. La pays fut unifié par le roi Fa Ngum en 1353 qui instaura un
bouddhisme mahayaniste, profondément réformé par des moines thaïs. Ses successeurs réussirent à maintenir tant bien
que mal la cohésion du royaume en s'appuyant sur le sangha. En 1527, le Theravada est proclamé religion d'état.
Pour faire face à la menace birmane, le roi Settharhirat déplace sa capitale à Vientiane,
plus facile à défendre et plus proche de ses alliés thaïs. Il apporte avec lui le fameux
Bouddha d'Emeraude qu'il dépose au Wat Phra Keo. Il fait construire les plus beaux
monuments bouddhiques du Laos.
Le Roi Surya Vongsa qui régna de 1637 à 1694 forgea un état fort et centralisé, avec
l'appui inconditionnel du clergé bouddhique qu'il associa aux grandes décisions politiques.
A sa mort, ce fut une suite de guerres intérieures, d'interventions étrangères avant que le
Laos ne devienne un protectorat français en 1893.
La guerre civile entre le Pathet Lao, soutenu par la Chine et les forces du sud soutenues
par l'occident conduisirent à la victoire des premiers nommés en 1975. Le roi Savang
Vatthana fut contraint d'abdiquer avant de mourir de faim dans un camp de déportés.
Le bouddhisme laotien connut ses heures les plus noires. Les monastères furent fermés,
les livres détruits, 25 000 bonzes forcés de renoncer à leurs vœux, des milliers d'autres
furent déportés ou tués.
Il fallut attendre les années 90 pour que le bouddhisme soit de nouveau autorisé au Laos.
Aujourd'hui, 90% des laotiens se considèrent comme des bouddhistes pratiquants.
Les atermoiements du Cambodge
Même si les Khmers constituent l'ethnie dominante (70% de la population) du Cambodge, c'est
l'hétérogénéité qui prédomine.
Jusqu'au Vème siècle, c'est le royaume du Funan, fortement indianisé avec des influences
bouddhistes, qui domine la région. En 514, une entité Khmère se révolte contre l'autorité
royale du Funan et s'érige en royaume, le Chanla. Un demi siècle plus tard, ses souverains
achevèrent la conquête du Funan en cinquante ans, avant de s'emparer des Terres du Nord et
du delta du Mékong.
Au VIIème siècle, Jayavarman Ier établit sa capitale à Angkor Boreï, maintenant une religion
hindouiste avec des influences bouddhistes. Le sud du pays passe sous influence javanaise.
En 802, Jayavarman II installe sa capitale à Angkor Tom. Il rassemble les principaux princes
sous son autorité, chasse les javanais du pays et fonde le premier royaume khmer, le
Kampuchea. Il fait codifier le culte de Lokeshvara, syncrétisme entre le shivaïsme et le Mahayana, organisé autour du "
temple-montagne " symbolisant l'univers, et officialise l'institution du Devaraja, " dieu roi ".
Jayavarman VII qui régna 37 ans de 1181 à 1218 était un bouddhiste fervent
qui professait le Mahayana, favorisant l'expansion du bouddhisme dans le
peuple. Il fit construire les magnifiques temples-montagnes d'Angkor Tom et le
Bayon. Mais son fils restaura le Shivaïsme comme la seule religion officielle,
transformant les sanctuaires bouddhistes en temples hindous.
Jusqu'au XIIIème siècle, le pays demeura la plus grande puissance politique et
le phare culturel de l'Asie du Sud-Est.
Au XIVème siècle, Jayavarman Parameshvara imposa de nouveau le
bouddhisme, mais cette fois le Theravada. Ce changement se fit sans difficulté
auprès d'une population lassée des changements permanents et attirée par le
modèle social plus égalitaire de l'Hinayana. Le Shivaïsme et le Mahayana
s'éteignirent en moins d'un demi siècle.
La dynastie Angkorienne disparut en 1431, lors du dernier pillage d'Angkor par les Thaïs. La décadence du Cambodge se
poursuivit inéluctablement, voyant se succéder les occupations chinoises puis vietnamiennes et européennes . Le pays est
incorporé à l'Indochine française en 1887. Le bouddhisme se trouva alors confronté aux missionnaires chrétiens.
Ayant obtenu son indépendance en 1953, le Cambodge vécut à partir de 1973 un
martyre sous les Khmers Rouges. Trois millions de morts, soit un habitant sur
quatre. Le clergé bouddhique subit une répression sanglante. Les bonzes furent
exécutés par milliers, les temples détruits, les livres sacrés brulés en autodafés
publics.
En 1980, les 3 500 bonzes restant sur les 95 000 recensés à l'arrivée des Khmers
Rouges furent contraints d'assister à des cours de " rééducation ".
En 1989, le gouvernement, après avoir présenté ses excuses officielles au sangha,
rétablit le bouddhisme theravadin comme religion d'Etat.
Aujourd’hui, 90% des cambodgiens affirment être bouddhistes et la moitié se disent de bons pratiquants.
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